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Vidéosurveillance : ce que révèlait en 2011 la Cour des comptes
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Un aperçu par Jean-Marc Manach d’un rapport de la Cour des Comptes à propos de la vidéosurveillance, publié en 2011.
La lecture du chapitre consacré à la vidéosurveillance devrait être rendu obligatoire à tout maire désireux d’équiper sa ville de caméras. On y apprend en effet que les préfets, chargés de promouvoir la vidéoprotection, autorisent de nombreuses installations de vidéosurveillance à violer la loi censée l’encadrer, et que les commissions départementales censées les contrôler n’en ont ni les moyens, ni la volonté… réduites à “s’assurer que le formulaire de demande (d’autorisation) est correctement rempli“.
Accessoirement, on apprend aussi que le ministère de l’Intérieur, qui veut tripler le nombre de caméras, ne sait pas compter : il avait en effet évoqué “environ 30 000 caméras en 2009, et 40 000 en 2010“. Or, l’enquête de la Cour, effectuée à partir des données rassemblées par la direction de la police et de la gendarmerie, a conduit à une estimation d’environ 10 000 caméras de surveillance de la voie publique à la fin de 2010…
La Cour des comptes s’étonne par ailleurs des conditions d’autorisation des systèmes de vidéosurveillance, que Charles Pasqua avait réussi, en 1995, à retirer du périmètre de la CNIL pour le confier aux préfets, et donc au ministère de l’Intérieur :
La commission départementale de la vidéoprotection se borne à vérifier que les engagements écrits, pris par le pétitionnaire, sont conformes à la réglementation. Elle ne se rend jamais sur place. De fait, elle n’a aucune marge d’appréciation et son rôle est exclusivement formel : elle s’assure que le formulaire de demande est correctement rempli et que les pièces exigées sont jointes.
Dans un chapitre consacré au “large pouvoir d’appréciation du préfet“, les magistrats rappellent par ailleurs que ce dernier est “chargé de promouvoir auprès des élus locaux les avantages de la vidéosurveillance de la voie publique (et) de mettre en œuvre un « plan départemental de développement de la vidéoprotection » dans les sites les plus sensibles“.
Or, le préfet est aussi celui qui délivre “les autorisations d’installation de tels systèmes“… Une double casquette d’autant plus facile à porter que “le préfet n’est pas lié par l’avis rendu par la commission départementale, qui n’est que consultatif“, et qu’”il peut passer outre un avis défavorable“, comme ce fut le cas, notent les magistrats, pour l’installation de 32 caméras de vidéosurveillance à Corbeil-Essonnes en 2006.
Signe que la vidéosurveillance est moins corrélée à la délinquance qu’au sentiment d’insécurité, la Cour souligne enfin qu’une “circulaire ministérielle a donné instruction aux préfets de considérer que le risque d’insécurité est avéré même si le lieu ou l’établissement à surveiller n’ont pas connu d’agression ou de vol au moment de la demande“… :
Les préfets disposent donc d’une grande marge d’appréciation. Ils accordent des autorisations d’installation de caméras de surveillance de la voie publique dans des quartiers où la délinquance baisse ou dans des communes où son niveau est faible.